Chez Cheval peut sembler de prime abord un commerce comme tant d’autres, mais ce n’est pas le cas. Ses particularités : le café est très bon, on s’y régale, l’ambiance est très agréable et les gens qui y travaillent sont sympathiques et attachants. Mais plus encore, ce Café, propriété de Patricia Paquin et de Louis-François Marcotte, a une mission sociale qui doit être saluée. « On a une trentaine d’employés et du nombre, il y en a treize qui ont un TSA ( trouble du spectre de l’autisme), dont l’âge s’échelonne de 15 à 25 ans », précise Patricia.
Texte et photos: Daniel Daignault
Parmi eux, Benjamin, le fils de l’animatrice, qui est devenu une vedette à part entière avec notamment sa page Facebook, Le monde de Benjamin, qui compte plus de 87 000 fidèles. Un Café, donc, qui permet à des autistes, dans bien des cas, de s’initier au marché du travail tout en ayant l’opportunité de prendre confiance en leurs capacités. Une idée brillante qui va assurément changer le cours des choses pour ces jeunes et leurs proches, sans oublier aussi les clients de Chez Cheval .
Le commerce situé à Mont-Saint-Hilaire a ouvert ses portes le 9 septembre dernier et le succès a été instantané. « Je me souviens de cette journée où nous étions cinq à l’ouverture, et lorsque nous avons terminé la journée, nous étions treize employés! » Tout le monde est arrivé en renfort, tant leurs amis, des proches, des gens qui voulaient travailler au Café pour mettre la main à la pâte et les aider à servir les nombreux clients. « Il y avait du monde du matin au soir, c’était fou, mais tellement encourageant », ajoute-t-elle.
« On va être très honnête : parmi nos jeunes, on retrouve tous les spectres de l’autisme. Il y a ceux qui sont hyperfonctionnels, d’autres qui sont plus réservés ou aiment être en contact avec les gens, alors que certains préfèrent être à la plonge. Benjamin et Antoine, qu’on a pu voir dans les capsules sur TOU.TV, sont des fanfarons porte-paroles! Ils font toutes sortes de choses dans le restaurant, ils ne finissent pas toujours leurs tâches, mais bon, ils aiment ce qu’ils font » dit-elle avec un large sourire.
Le travail au Café a un impact positif sur les autistes?
Ce qui est intéressant est que je m’aperçois que toutes les personnes qui passent ici, qui viennent s’asseoir pour boire et manger ou passer une commande, démontrent en quelque sorte beaucoup de bienveillance en prenant nos jeunes sous leurs ailes. Ils sont gentils et attentionnés avec eux, on les aide sans les infantiliser et ça contribue à faire en sorte qu’ils se sentent bien. Et ça rejaillit sur tout le monde.
Il y a beaucoup de gens qui viennent Chez Cheval parce qu’on a cette mission-là. Cet automne, des parents sont venus avec leurs deux petits garçons et leur fille. Les garçons étaient autistes et portaient des coquilles pour amoindrir le son. Ils ont mangé, j’ai discuté avec eux, et on a parlé des coquilles très simplement; je leur ai dit notamment dit que Benjamin en avait moins besoin maintenant, mais qu’il en avait déjà portés. Bref, c’était très sympathique. Avant de partir, la maman est venue me voir pour me remercier et me dire qu’ils avaient fait un très grand détour pour venir au Café. Puis, elle m’a confié que sa petite fille lui avait dit : « Maman, je vais travailler ici plus tard, parce que je veux travailler avec mes deux frères. » Des témoignages comme celui-là, j’en ai toutes les semaines. Tous les jours, il y a des jeunes et des parents qui vivent dans cet univers-là qui viennent Chez Cheval.
Comment l’idée vous est-elle venue, Louis-François et toi, d’ouvrir ce Café?
J’étais seule à la maison un midi et je mangeais en regardant la télé. Il y avait une émission à MATV et l’animatrice recevait un homme, Bertin Savard, propriétaire d’un Café qui s’appelle Au Croissant 21, situé à Rigaud. Il a raconté qu’il avait un garçon qui était trisomique et que sa mission était de faire travailler son fils et aussi sa fille, qui est en fauteuil roulant et vit avec la paralysie cérébrale. J’ai appris qu’ils embauchaient des personnes vivant avec différents handicaps physiques et que son entreprise connaissait beaucoup de succès. Quand Louis-François est arrivé à la maison le soir, je lui ai dit que je savais ce que nous allions faire et il a aimé mon idée.
C’est un beau projet!
Oui, c’est l’fun, et c’est avant tout un projet, je ne me sens pas investie d’une mission. C’est une chose parmi d’autres, ça ne nous empêche pas d’avoir d’autres occupations, et je dois dire que je suis très contente jusqu’à maintenant. C’est vraiment hyper-agréable et les parents des jeunes qui travaillent au Café constatent à quel point ils aiment ce qu’ils font et que ça leur est bénéfique au niveau de leur confiance en soi et de leur autonomie.
La petite famille de Patricia et de Louis-François habite à proximité de Chez Cheval, un changement de vie qu’ils ont embrassé à l’été 2018. Florence et Gabriel ont respectivement 4 et 9 ans, alors que Benjamin a célébré son dix-huitième anniversaire en octobre dernier.
« On a des chevaux, des cochons, des poules dont il faut s’occuper, et la maison elle-même demande de l’entretien en plus du Café et de nos autres occupations, mais te dire à quel point c’est fantastique! Je n’arrête jamais, c’est un autre mode de vie que nous avons adopté et c’est tellement agréable!
Ce Café situé à Mont-Saint-Hilaire est vraiment une belle initiative, et on ne peut que souhaiter que d’autres employeurs, d’autres compagnies, fassent autant preuve d’ouverture, surtout au moment où l’on entend à répétition que les propriétaires de restaurants et de plusieurs autres commerces sont à court de personnel.