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la boxeuse Kim Clavel: UNE détermination à toute épreuve

Kim Clavel est une jeune femme déterminée qui a de grands objectifs en tête. Et elle est intense aussi et sérieuse pour atteindre ses buts. J’ai eu l’occasion de la voir s’entraîner dans un gymnase au Complexe sportif Claude-Robillard, en préparation de son combat du 7 décembre, et j’ai été vraiment impressionné par son ardeur au travail, son souci de s’appliquer à bien faire les choses, de ne négliger aucun détail sous la supervision de son entraîneuse, Danielle Bouchard.

Texte: Daniel Daignault

CHAMPIONNE!

Lorsque j’ai rencontré la boxeuse Kim Clavel pour réaliser cette entrevue, elle était à l’entraînement en vue de son combat du 7 décembre. Le combat a eu lieu et Kim a remporté le duel par décision unanime contre la Mexicaine Esmeralda Gaona Sagahon. Il s’agissait d’un combat de championnat pour Kim, qui a ainsi mis la main sur sa toute première ceinture, devenant la nouvelle championne des poids mi-mouches de la NABF.

Lors d’une mêlée de presse après le combat, Kim Clavel confiait notamment : « Ça représente beaucoup de travail, ça fait quatorze ans que je m’entraîne fort et j’ai tout dédié à la boxe. J’ai pris des décisions, j’ai quitté mon patelin, la famille à Joliette; je vis à Montréal, j’ai tout dédié avec Danielle (Danielle Bouchard, son entraîneuse), je m’entraîne à temps plein, je n’ai plus de revenus de travail (…) On a gagné en équipe ce soir, on a vécu des hauts et des bas dans ma carrière, mais là, l’objectif, on vient de l’atteindre, et on va avoir un nouvel objectif maintenant. »

Je vous invite à poursuivre la suite de l’entrevue pour mieux connaître la boxeuse.

 « Je pense que la détermination est un trait de ma personnalité dans toutes les sphères de ma vie, dans tout ce que j’aime. Quand j’ai une passion, j’y vais à fond, je suis comme ça depuis que je suis toute petite », confie celle qui, hors du ring, travaillait toujours comme infirmière auxiliaire il y a quelques mois à peine. Elle a décidé de prendre un congé sans solde d’un an, jusqu’en août prochain, pour se concentrer pleinement sur ses aspirations à titre de boxeuse professionnelle.

Photo : Vincent Ethier/EOTTM

« J’y vais une année à la fois, je ne sais pas où je vais en être dans un an. Je travaille quand même dans un hôpital à Joliette, et là, je suis à Montréal, à côté du gym et je suis bien. C’est sûr que dans le meilleur des mondes, j’aimerais peut-être pouvoir prendre une deuxième année sabbatique, et je pense qu’au niveau où je suis rendue dans ma carrière, je ne peux pas travailler à temps plein et boxer à temps plein. Je vais avoir des décisions à prendre à ce moment-là. »

Kim se prépare pour son entraînement. Photo: Daniel Daignault

Depuis qu’elle est devenue boxeuse professionnelle après avoir disputé 85 combats chez les amateurs, Kim a remporté chacun de ses dix combats. Son tout premier a eu lieu le 12 décembre 2017 et le plus récent le 7 décembre, au Centre Bell, où elle donc a mis la main sur son premier titre chez les pros, celui de championne des poids mi-mouches de la NABF. Son adversaire avait une fiche de 7 victoires et 3 défaites avant le combat.

Photo: Daniel Daignault

Kim est âgée de 29 ans et est originaire de Joliette. Elle a découvert la boxe alors qu’elle était adolescente. « J’ai commencé à boxer à l’âge de 15 ans. Je faisais beaucoup de sport à ce moment et depuis que j’étais toute petite, autant du basketball , de l’équitation, du Taekwondo, du cross-country. Il y avait un petit club de boxe à Joliette, à l’époque, j’avais des petits problèmes dans ma vie d’adolescente, et après avoir fait un premier entrainement, ça a été un coup de foudre et je n’ai jamais abandonné la boxe par la suite. Ça a été bénéfique pour moi à plusieurs nouveaux. Huit mois plus tard, à 16 ans, j’ai fait mon premier combat et un an plus tard, j’ai gagné mes premiers petits Championnats provinciaux juniors. »

Photo: Daniel Daignault

Tu parles d’équitation, tu as ça vraiment dans le sang depuis que tu es toute petite?

Oui, j’ai monté à cheval avant même de savoir marcher! Mon père a été champion du monde de rodéo, il a habité vraiment longtemps au Texas. Ma sœur a suivi ses traces, elle habite aux États-Unis et entraîne des chevaux sur un gros ranch. Moi j’ai choisi la boxe et ils m’encouragent, mais c’est sûr qu’après ma carrière, c’est sûr que je vais me racheter un cheval. Je vais recommencer à faire des compétitions d’équitation. Ma mère et son conjoint ont une ferme à Saint-Liguori où ils ont vingt chevaux, et j’aime y aller quand j’en ai l’occasion.

Photo: Daniel Daignault

Ta sœur et toi, j’imagine que vous ne vous voyez pas souvent?

Non, ça fait quatre ans qu’elle est partie. Elle est mariée et vit en Oklahoma. C’est sûr que sur le coup, ça a été une peine d’amour, on n’a qu’un an et demi de différence elle et moi et nous étions vraiment proches. Quand on se téléphone ou par Skype, on a parfois des petites larmes qui nous viennent aux yeux parce que j’aimerais qu’elle soit ici pour vivre ma carrière professionnelle, autant que moi j’aimerais être là-bas avec elle. Heureusement, avec les réseaux sociaux, on peut se parler beaucoup et j’y vais au moins une ou deux fois par année.

Photo: Vincent EthierEOTTM©2018

Marie-Ève Dicaire et toi êtes les deux boxeuses québécoises les plus en vue, as-tu l’impression que vous contribuez à ce qu’il y ait un essor de la boxe chez les femmes?

Clairement, je pense que ça fait une différence. Je pense que ça encourage d’autres personnes à faire de la boxe professionnelle. Avant, c’est comme si les filles, on se disait : « Ben voyons, il n’y aucune fille professionnelle, de quoi est-ce que je vais avoir l’air? Personne ne va vouloir me faire signer un contrat… » Marie-Ève a cassé la glace, elle a fait de belles choses, et moi j’arrive aussi, on n’a pas de défaite toutes les deux et on fait de beaux combats. On démontre que nous sommes très techniques, très déterminées sur le ring et qu’on peut faire de beaux spectacles. Je pense que les gens commencent à apprivoiser la boxe féminine. Il va y en avoir de plus en plus, autant au Canada qu’aux États-Unis. »

Kim Clavel vs Ana Karen Compean Centre Vidéotron Vincent Ethier/EOTTM © 2018

Quelle est ta plus grande qualité comme boxeuse, ta plus belle aptitude?

Je suis très polyvalente, je dirais que je sais m’adapter à presque tous les styles. Si une adversaire aime boxer à distance, je peux le faire, comme si elle aime boxer au corps, et je peux boxer autant contre une gauchère qu’une droitière. Je suis de plus en plus calme aussi durant les combats, j’écoute ce qu’on me dit dans mon coin, entre les rounds, et on s’adapte ensemble. Je dirais aussi que j’ai énormément d’énergie, même que mon énergie augmente au fil des rounds. Je pense que c’est aussi l’une de mes forces.

Photo : Vincent Ethier/EOTTM
Photo : Vincent Ethier/EOTTM

Et quelle est ta plus grande qualité comme infirmière?

Je pense que c’est le lien que je développe avec mes patients. L’empathie, le lien de confiance que j’ai avec eux. J’ai travaillé autant en maternité, avec les mamans qui viennent d’accoucher, qu’aux soins palliatifs et dans les centres de personnes âgées. Je dirais aussi que j’ai un bon jugement clinique. Autant je m’adapte dans le ring, autant je sais m’adapter aussi avec la clientèle à l’hôpital.

Photo: Daniel Daignault

Tu as 29 ans, quels sont tes objectifs, et jusqu’à quel âge crois-tu faire carrière dans la boxe?

C’est très dur à dire parce que ça me passionne autant qu’il y a des années, alors tant que la passion va y être, je vais continuer dans ce monde-là. Il y a bien sûr le corps, la santé, c’est sûr que ce n’est pas un sport que tu fais quand tu n’es pas en santé, alors je touche du bois et j’espère continuer à être en forme comme je le suis en ce moment. Je vais sûrement continuer quelques années, je ne sais pas si je vais avoir quelqu’un dans ma vie, et un jour je voudrai peut-être avoir des enfants, je n’ai aucune idée de ce qui m’attend. Je vis le moment présent, je ne stresse pas trop avec l’avenir parce que, justement, je vais oublier de vivre le moment présent. Il arrivera ce qu’il arrivera, je suis bien entourée et je ne manque pas d’amour.

Kim Clavel à l’entraînement, en compagnie de Danielle Bouchard. Photo: Daniel Daignault

On demande rarement cela à un boxeur, mais est-ce que tu as des craintes parfois de te faire casser le nez, par exemple?

Non, ça fait partie du sport. Si je faisais du patinage artistique ou de la gymnastique, je me casserais les chevilles et les poignets et j’aurais les genoux finis. Là, c’est autre chose, c’est le visage et c’est sûr que c’est la première chose que l’on voit. Je me dis toujours qu’après ma carrière, si j’ai le nez cassé et qu’il est tout croche, j’irai le refaire faire. Sinon, des bleus, des coupures, ça guérit.

Kim Clavel vs Ana Karen Compean, Centre Vidéotron. Photo : Vincent Ethier/EOTTM © 2018

Tu ne manques pas de confiance en toi, quel message aimerais-tu livrer aux jeunes filles et aux femmes pour qu’elles soient aussi bien dans leur peau que toi?

Je ne parle pas nécessairement de la boxe, mais juste le fait d’avoir une passion dans la vie, ça fait tellement du bien! Tu es fière de toi, tu persévères et tu atteins tes objectifs. Et c’est normal de vivre de hauts et des bas. Mon premier combat, je l’ai perdu, mais je n’ai pas abandonné par la suite. Il faut toujours se fixer de petits objectifs, à court terme, et une petite réussite par ci, une autre par là, ça t’amène à une grande réussite un jour. Il ne faut jamais perdre de vue son rêve ultime et continuer d’ y croire.

Photo: Vincent Ethier /EOTTM

C’est quand même curieux parce que comme boxeuse, ton objectif est de vaincre ton adversaire, de gagner tes combats, et même, quand l’occasion se présente, les mettre K.O. Et dans ton travail d’infirmière, ta tâche est de faire en sorte que tes patients se portent de mieux en mieux, que leur situation s’améliore pour qu’ils puissent quitter l’hôpital…

C’est vrai que c’est un drôle de paradoxe, mais si tu savais à quel point j’aime ce que je fais et comment la boxe a été profitable pour moi! Je suis en forme, je sais comment m’alimenter, j’ai de la confiance alors qu’avant, j’étais très timide. Je n’avais pas tant d’amies quand j’étais à l’école primaire, j’étais renfermée et la boxe m’a permis de m’extérioriser. Boxer, ça devient addictif, c’est dans mes tripes, dans mon sang, et j’ai besoin de ça pour vivre et être heureuse.

Danielle Bouchard, l’entraîneuse de Kim, travaille avec elle depuis neuf ans. Photo: Daniel Daignault

Tu travailles depuis plusieurs années avec Danielle Bouchard, ton entraîneuse qui est une exboxeuse et championne (elle a été la première Québécoise à disputer un combat de championnat du monde féminin en boxe professionnelle en 2008). Vous semblez vraiment complices!

Danielle est une perle, je ne l’échangerais pour rien au monde. Ça fait neuf ans qu’on travaille ensemble et on a créé un beau partenariat, on a un gros lien de confiance et nous nous parlons tous les jours, et pas seulement de boxe. Elle est devenue une amie et tout est simple avec elle. On a le même rêve et on le vit ensemble.

Photo: Daniel Daignault
Photo : Vincent Ethier / EOTTM©2018