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L’ALCOOL AU VOLANT, MÊME APRÈS LE VOLANT…

chronique juridique

par marie-pier boulet, bmd avocats inc.

Le 18 décembre 2018 a donné lieu à un changement plus qu’important en droit criminel. Sans dire que cela est passé inaperçu, il est clair que la nouvelle n’a peut-être pas été répandue.

Le saviez-vous ? Depuis le 18 décembre 2018, vous pouvez être accusée si votre taux d’alcoolémie dépasse 80 mg jusqu’à deux (2) heures après avoir conduit votre véhicule !

Voici le libellé du nouvel article prévoyant l’infraction de conduite avec un taux d’alcoolémie supérieur à la limite permise :

320.31

(…)

b) sous réserve du paragraphe (5), a, dans les deux heures suivant le moment où il a cessé de conduire un moyen de transport, une alcoolémie égale ou supérieure à quatre-vingts milligrammes d’alcool par cent millilitres de sang;

Impossible, il y a une erreur dans la loi…

Précisons tout de suite qu’une défense existe si votre consommation d’alcool a eu lieu après la conduite. En fait, la limite légale est toujours de 80 mg d’alcool dans le sang au moment de la conduite. Ainsi, si votre alcoolémie révèle un taux supérieur et que vous êtes en mesure d’établir que la consommation d’alcool après votre conduite ramène votre taux d’alcoolémie en deçà de 0.08 avant la conduite, vous avez une défense.

Avoir une défense ne signifie pas pour autant que vous ne serez pas accusée. Et c’est justement là le problème. Cette nouvelle infraction créé des situations graves et lourdes de conséquences, puisqu’il revient à la personne accusée d’établir que son taux était sous 80 mg au moment de la conduite, qu’elle a nécessairement consommé en partie ou en totalité après la conduite.

Quantité d’alcool consommée, durée de la consommation : le scénario complet de la consommation devra donc être maitrisé et présenté à la Cour. Tout cela sujet à l’appréciation du juge quant à la crédibilité de votre témoignage en ce sens.  

Prouver son innocence

On vous oblige littéralement à prouver votre innocence. C’est déjà le cas pour le crime aussi peu connu et peu maitrisé de garde et contrôle d’un véhicule à moteur avec les capacités affaiblies ou plus de 80 mg d’alcool.

Dans le cas de la garde et contrôle, à partir du moment où vous vous trouvez à la place du conducteur dans un véhicule, la loi prend pour acquis que vous représentez un risque de le mettre en mouvement. Vous devez donc argumenter devant la Cour que vous n’aviez pas l’intention de conduire. Plus précisément, vous devez être crue sur le fait que vous ne constituiez pas un danger à ce que le véhicule soit mis en mouvement par votre présence dans celui-ci. Pour ce faire, vous devriez notamment établir que vous aviez un plan pour rentrer à la maison et au final ne pas conduire.

La même logique s’applique pour vous défendre du crime d’avoir un taux d’alcoolémie supérieur même deux (2) heures après avoir conduit. Vous serez accusée et vous devrez supporter le fardeau de prouver que votre taux d’alcoolémie au moment de la conduite ne dépassait pas 80 mg. En plus du scénario de consommation qui devra être exposé à la Cour, vous aurez à supporter des frais d’expert et d’avocat pour vous permettre de présenter une telle preuve, à la fois scientifique et technique. Cela est véritablement inquiétant, car si vous deviez ne pas être crue, votre défense ne tiendrait pas. Pire encore, si vous ne souhaitiez pas assumer les frais et la pression qu’entraîne le processus judiciaire, vous accepterez les conséquences pour un crime que vous n’avez pas commis.

Le texte utilise la forme  féminine pour alléger le texte  et parce qu’il est publié sur un site qui donne la parole aux femmes.