Je me souviens exactement de ce moment où, assise dans mon bureau de conseillère en finances, une certitude évidente m’a envahie. Il y a maintenant dix ans, enceinte de trois semaines et de mon troisième bébé, j’allais prendre la décision de mettre de côté ma carrière et de rentrer à la maison. De rentrer pour un bon bout. À ce moment, je n’avais aucune idée si j’allais être à la hauteur, si j’allais aimer ce nouveau rôle, ce nouveau mode de vie. J’avais par contre la certitude que c’était l’endroit où je voulais être, à la maison avec mes bébés.
Texte : Julie Vincent
Bien entendu, et le plus important même, c’est que cette décision s’est prise à deux et germait déjà depuis un moment dans nos têtes. Avant même d’avoir des enfants, pendant que nous étions à l’université, mon conjoint et moi croyions à ce modèle familial. Pour nous, avoir trois ou quatre enfants impliquait nécessairement que je demeure à la maison. C’était l’équilibre idéal à nos yeux.
Avant l’arrivée des enfants, c’était les études, le travail et le tourbillon, sans trop se poser de questions. J’embarquais dans le bateau et c’était parfait ainsi et rassurant. Mais depuis l’arrivée des enfants, j’ai eu envie que l’on se crée notre monde à nous, un monde qui nous convient, loin des attentes et des modèles préconçus de notre société.
J’ai dû faire face à mes envies profondes, à ce que je voulais vraiment, et laisser ce qui ne me convenait plus. C’était déroutant! Moi qui aimais suivre un chemin bien balisé, qui aimait faire partie de la norme, qui croyais que le bonheur était lié surtout à la carrière, et qui étais persuadée que la carrière était l’ultime réussite… Lorsque j’ai mis de côté cette carrière pour devenir maman à la maison, ce sont toutes mes références qui s’en sont allées. J’étais chez moi, sans horaire fixe, sans plan d’action mensuel, sans évaluation trimestrielle de mes objectifs, sans formation continue, sans collègue et sans patron. Je devais m’organiser, planifier, me donner des objectifs et me motiver. J’ai accueilli ce nouveau rôle comme un engagement, un grand projet. Je voulais que ça fonctionne!
Autant cette décision était claire et rapide à prendre, autant j’ai dû apprendre à assumer ce choix. En fait, j’ai dû tout apprendre. Certains me disent que c’est facile pour moi, que j’ai ça dans le sang, mais ce n’est pas parce que tu cours un marathon en moins de trois heures que c’est nécessairement facile! Et je n’ai pas décidé d’être à la maison parce que je croyais que ça allait être facile et que j’étais faite pour ça…
Cette décision est tout simplement le résultat d’un grand désir. Celui d’être encore plus disponible pour nos trois enfants, d’être là au dîner, d’avoir tout le temps nécessaire pour les devoirs, cuisiner dans le plaisir, organiser mon horaire, avoir du temps pour courir et m’entraîner, et avoir du temps pour créer. Donner du temps à mes envies.
Je dois avouer qu’au début, même jusqu’à tout récemment, j’ai eu à apprendre à assumer ce choix. Maman à la maison n’est pas trop 2020 avec la performance qui est mise de l’avant, la conciliation travail-famille et le modèle superwoman véhiculé et hyper valorisé, mais en même temps difficilement atteignable sans trop de stress et de pression. Assumer ce choix signifiait qu’il fallait que je fasse abstraction des jugements que pouvaient poser certaines personnes, et être fière de ce choix.
Ce rôle d’être maman à la maison, après celui d’être devenue mère, est le plus beau cadeau que j’ai pu me faire! Cela représente une immense liberté et un bel équilibre pour notre famille.
Une équipe!
Mon conjoint et moi formons une équipe solide. Pour nous, le mode de vie qu’on s’est donné est un équilibre idéal. C’est efficace! On se complète à merveille. Et ce qui est magique est qu’on se comprend, il me comprend. Ma réalité n’est pas toujours la sienne et vice versa, mais il a la sensibilité et la délicatesse de pouvoir se mettre à ma place et me comprendre. Ce projet d’être maman à la maison ne serait pas possible si nous ne nous supportions pas ainsi. C’est une décision de couple parce qu’il y a évidemment toute la question monétaire qui implique une telle décision. Ce n’est pas négligeable, mais en bon comptable qu’il est, ça fonctionne!
Le bonheur
Pour moi, le bonheur passe par plusieurs choses comme les soupers en amoureux du vendredi soir, la course à pied, les soirées entre amis, réveiller les enfants le matin en les collant et en flattant leurs cheveux, le ski en famille, les recettes que prépare mon chum. C’est aussi de voir mes enfants s’engager dans des sports ou des arts qu’ils ont choisis. De les voir prendre confiance en eux, s’épanouir, développer leurs passions et, en somme, découvrir la vie. C’est aussi de voyager avec eux. Je veux entretenir tous ces bonheurs, je veux être là, à leurs côtés, et pour ça, il faut prendre le temps. Le bonheur est simple, mais il faut y mettre beaucoup d’énergie et d’amour au quotidien.
Peu importe le chemin que nous prenons en tant que femmes, comme parent ou en tant que couple, nous avons la responsabilité d’assumer nos choix. Le modèle idéal est celui qui saura nous apporter la joie et l’équilibre. Nous avons tous la liberté de choisir et de prendre un chemin différent s’il le faut, mais l’important est de suivre son chemin en se basant sur ses désirs, ses envies, et sa quête du bonheur.
